Revenir en haut

LES HEMORRAGIES DIGESTIVES DU NOURRISSON ET DE L’ENFANT 1ère partie : HEMATEMESE

1) Définition : l’hématémèse est un rejet de sang rouge ou noirâtre par la bouche ou le nez lors d’un effort de vomissement. Le sang provient de l’œsophage, de l’estomac ou du duodénum et sont abondance peut être très variable.
Chez le nourrisson et le jeune enfant, l’hématémèse est parfois difficile à distinguer d’un saignement d’origine buccale ou ORL (par exemple, sang d’origine nasale avalé par l ‘enfant).

L’hématémèse est facile à reconnaître sauf lorsqu’elle est très minime, limitée à quelques filets rouges ou brunâtres striant les aliments rejetés. C’est essentiellement par l’appréciation du retentissement de l’hémorragie sur l’état général que l’on pourra organiser la prise en charge de l’enfant.

2) Causes :

a) Chez le nouveau-né : les hémorragies digestives ne sont pas rares en période néonatale. Il convient cependant de les distinguer des vomissements de sang dégluti au cours de l’accouchement ou de sang ingéré au cours des tétées en cas de mammite hémorragique, mais cela ne doit en pratique poser aucun problème.

Les causes principales sont :

- l’oesophago-gastrite néonatale (OGNN): la survenue de lésions sévères du tractus digestif haut en période néonatale est relativement fréquente. Le contraste entre la sévérité des signes cliniques et endoscopiques et le caractère habituellement rapidement favorable de leur évolution caractérise les OGNN.
Les signes révélateurs sont variable, à type de refus d’alimentation, régurgitations, vomissements, pleurs incessants etc… ou au contraire, plus alarmants à type d’hémorragies digestives, de cyanose, de bradycardies ou de malaises. Quel que soit l’aspect endoscopique, l’évolution est en général rapidement favorable. Le traitement médical est cependant indispensable compte-tenu de l’importance de la symptomatologie douloureuse.

- l’entérocolite ulcéro-nécrosante est exceptionnelle,

- l’oesophagite peptique hémorragique est rare au cours des premiers mois de vie.

- les ulcères de stress sont principalement observés en réanimation néonatale.



b) Chez le nourisson : la cause la plus fréquente d’hémorragie digestive est représentée par l’oesophagite peptique. Il s’agit le plus souvent d’hémorragies minimes (régurgitations teintées de sang rouge). L’intensité des manifestations douloureuses liées à l’oesophagite peptique est très variable d’un enfant à l’autre. Le traitement fait appel aux antiacides ou aux anti-H2 (Ranitidine) ou aux inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) associés à un traitement prokinétique (par exemple Dompéridone : Motilium*).

Les ulcérations médicamenteuses de l’œsophage (Doxycycline, acide acétylsalicylique) sont une cause exceptionnelle d’hématémèse chez le nourrisson.

Les autres causes : gastrite aigue, syndrome de Mallory-Weiss, varices oesophagiennes ont été décrites mais sont très exceptionnelles chez le nourrisson.


c) Chez l'enfant :

- les hématémèses de cause oesophagienne sont dominées par l’oesophagite peptique et les hémorragies dues à des varices oesophagiennes. L’oesophagite peptique saigne rarement abondamment.
Il s’agit le plus souvent d’hémorragies de faible abondance voire microscopique à l’origine d’une anémie ferriprive. Les oesophagites ulcérées hémorragiques sont par contre fréquentes chez l’enfant encéphalopathe.

En cas d’anémie persistante ou à fortiori d’hématémèse macroscopique, l’endoscopie permet non seulement un diagnostic lésionnel mais également la recherche d’un endo-brachy-œsophage qui justifie un suivi particulier et l’usage prolongé d’IPP. La rupture de varices oesophagiennes est à l’origine d’hématémèses souvent abondantes. C’est fréquemment à l’occasion du premier épisode hémorragique qu’est découverte l’hypertension portale (HTP) à l’origine des varices.

- les hémorragies de cause oeso-cardiale : le syndrome de Mallory-Weiss fait suite à des efforts violents de vomissements et l’hématémèse peut être assez abondante. Les vomissements provoquent une déchirure de la muqueuse au niveau de la jonction entre l’œsophage et l’estomac. Le saignement est dû à la rupture de veinules et d’artérioles dans la profondeur de la muqueuse. Un traitement médical simple est suffisant dans la plupart des cas.

- les hématémèses de cause gastrique ou duodénales : les ulcères et les gastrites hémorragiques constituent les causes les plus fréquentes de saignement digestif haut. Les ulcères sont gastriques dans 1/3 des cas, duodénaux dans 2/3 des cas.
L’hémorragie est secondaire soit à l’ulcération d’une artériole ou d’une artère dans le fond de l’ulcère, soit à l’inflammation de la muqueuse entourant l’ulcère. Les ulcères primitifs qu’ils soient gastriques ou duodénaux sont dans la majorité des cas secondaires à une infection à Helicobacter pylori. Ils ne sont habituellement pas hémorragiques mais à l’origine de douleurs abdominales récidivantes prédominant au niveau du creux épigastrique.

Beaucoup plus fréquentes chez l’enfant que les ulcères, les gastrites sont responsables de douleurs abdominales, de vomissements et de troubles dyspeptiques. Elles ne sont qu’exceptionnellement à l’origine de saignement. Dans leur forme typique, les gastrites à Hélicobacter pylori sont facilement identifiables à la fibroscopie par l’aspect nodulaire marqué de la muqueuse mais il peut s’agir également d’une gastrite congestive antro-fundique sans particularité.

Dans tous les cas, quel que soit l’aspect endoscopique, la recherche d’Hélicobacter pylori par biopsie antrale doit être systématique. Les causes de gastrites et des ulcères sont nombreuses et reprises dans le tableau 2. Les gastrites à l’aspirine et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont très fréquentes et souvent hémorragiques.

Dans la mesure du possible, il est vivement recommandé aux parents de ne pas administrer sans avis médical d’aspirine ou de substance contenant de l’aspirine en raison du risque accru d’ulcère et da gastrite.
La liste non exhaustive des médicaments contenant de l’acide acétyl-salicylique est reprise dans le tableau 3.